Une toile d'araignée, symbole de la fragilité de la vie, tisse des liens entre souvenirs et émotions.

Il y avait ce champ immense, étendu sous un ciel d’un bleu trop pur pour que l’on y croit vraiment. Un champ qui semblait s’étirer à l’infini, où chaque brin d’herbe tremblait sous le souffle léger d’un vent inexistant, comme animé par un profond secret, un battement d’ailes d’insecte que l’oreille humaine ne pourrait jamais saisir. Au centre, presque invisible, une petite toile d’araignée flottait, comme suspendue entre deux mondes, frêle tissage de filaments argentés, retenant en son sein les échos d’un passé révolu.

Cette toile, c’était la vie elle-même. Fragile, éphémère, tendue entre les doigts d’un dieu invisible, tissant patiemment le destin de ceux qui foulent la terre, de ceux qui s’aiment, se déchirent, et finissent par disparaître dans l’ombre. Et au milieu de cette toile, minuscule et pourtant centrale, résidait l’absence. Ton absence, envolé comme une feuille morte, emporté par un souffle qui n’appartient qu’au vide.

Tu n’es plus là, et pourtant, je t’imagine, accroché à chaque filament de cette toile, comme une goutte de rosée qui refuse de s’évaporer. Tu le vois ce fil tendu à l’extrême, qui menace à chaque instant de se rompre, laissant derrière lui un vide béant, un trou noir qui aspire tout ce qui est beau, tout ce qui est doux.

Je marche dans ce champ, seul, entouré de ces herbes folles. Tu es partout et nulle part, spectre bienveillant. A moi aujourd’hui de retrouver le fil de cette vie qui s’effiloche entre mes doigts.

L’araignée, elle, continue de tisser sa toile. Inlassable, indifférente aux drames humains, elle tisse et retisse, répare ce qui a été brisé, renforce ce qui a été affaibli. Elle est là, suspendue, silencieuse, sereine. Elle sait que tout est lié, que chaque fil, aussi fin soit-il, relie un instant à un autre, un souvenir à une émotion. Elle est Dieu, elle est le destin, elle est ce qui reste quand tout le reste a disparu. Elle veille sur moi, sans un mot, sans un geste.

La toile scintille sous le soleil, chaque filament attrapant la lumière, la transformant en une myriade de couleurs, en un arc-en-ciel fragile, prêt à s’évanouir au moindre souffle de vent. C’est là, dans cette fragilité, que réside, paraît-il, la beauté. C’est là, dans cet instant si ténu, que je ressens toute cette vie que tu m’as offerte, toi qui n’es plus. Alors si tu m’entends, je te dis merci. Merci. Merci. Dix millions de merci. Et je te demande pardon.

Le vent se lève, une brise légère qui caresse les herbes, qui fait frémir la toile. L’araignée, imperturbable, continue son œuvre, réparant ici, renforçant là, tissant l’éternité avec une patience divine. Elle sait que tout finira par s’effondrer, que tout retournera au néant, mais elle tisse malgré tout, elle tisse parce que c’est tout ce qu’elle peut faire, parce que c’est sa nature. Et moi, je marche, je me perds dans ce champ qui semble ne jamais finir, je me perds dans ce labyrinthe de souvenirs et de regrets.

L’araignée est Dieu, et Dieu est l’araignée. Une présence silencieuse, discrète, presque absente. Elle tisse les liens qui nous unissent, qui nous relient aux autres, mais aussi à nous-mêmes, à ce que nous avons été, à ce que nous serons. Et quand ces liens se brisent, elle est là, toujours, pour les retisser, pour les renforcer, pour les réparer.

Je m’assois dans l’herbe. Je ferme les yeux, je respire. Tu es là.

Camille

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